Comment mieux mesurer le chômage ?

Alors que le chômage est un épisode souvent très difficile à vivre, mesurer son ampleur est une nécessité absolue pour permettre à l’État de prendre les mesures adéquates pour le réduire. Mais comment mieux le mesurer ?

Alors que le chômage est un épisode souvent très difficile à vivre, mesurer son ampleur est une nécessité absolue pour permettre à l’État de prendre les mesures adéquates pour le réduire. Mais comment mieux le mesurer ?

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Du point de vue de la société, être capable de mesurer les phénomènes économiques et sociaux est essentiel : cela permet à l’État d’adapter les politiques publiques, et cela permet aux citoyens (au moins en théorie) d’avoir des débats politiques fondés sur l’état réel du monde plutôt que sur des fantasmes. Le chômage n’y échappe pas.

Au niveau international, le Bureau International du Travail (BIT) a établi une définition de ce qu’est un chômeur en 1982 :

Un chômeur est une personne en âge de travailler (15 ans ou plus) qui répond simultanément à trois conditions :

  • être sans emploi, c’est à dire ne pas avoir travaillé au moins une heure durant une semaine de référence ;
  • être disponible pour prendre un emploi dans les 15 jours ;
  • avoir cherché activement un emploi dans le mois précédent ou en avoir trouvé un qui commence dans moins de trois mois.

Cette définition est utilisée par de nombreux pays dans le monde, et permet de faire des comparaisons internationales. En outre, sa stabilité (elle n’a pas bougé depuis 1982) permet de faire des comparaisons dans le temps.

En France, c’est l’INSEE qui calcule tous les trois mois le taux de chômage. Or, dans les médias, c’est un autre chiffre qui est plus souvent commenté : le nombre d’inscrits à Pôle Emploi.

Sans entrer dans de trop nombreux détails techniques, les chiffres de Pôle Emploi ne sont pas un indicateur économique mais un indicateur administratif : alors que le taux de chômage mesure la proportion de la population active qui est au chômage, les chiffres de Pôle Emploi quantifient le nombre de personnes administrativement inscrites à Pôle Emploi. Or, il est possible d’être chômeur sans être inscrit à Pôle Emploi, et d’être inscrit à Pôle Emploi sans être chômeur.

En d’autres termes, les chiffres de Pôle Emploi ne sont pas une très bonne mesure du chômage. Alors pourquoi sont-ils plus régulièrement commentés que ceux de l’INSEE ? Pour une raison simple : là où les chiffres de l’INSEE sont trimestriels, ceux de Pôle Emploi sont… mensuels ! Vu la vitesse du cycle des informations, je pense qu’il n’est pas utile d’en dire plus.

Passer à une publication trimestrielle des chiffres de Pôle Emploi est discuté depuis quelques temps déjà. L’enjeu est double :

  1. donner au public une meilleure estimation de la situation réelle du marché de l’emploi
  2. éviter les manipulations administratives

Sur le second point, le problème est que les données de Pôle Emploi étant administratives, il est « facile » pour un gouvernement (par exemple à l’approche d’élections importantes) d’essayer de masquer l’état réel du marché du travail français : il suffit de modifier les règles d’inscription ou de fonctionnement de Pôle Emploi. Sans dire que de telles manipulations soient fréquentes (si vous avez des données sur le sujet, je suis preneur !), le fait qu’elles soient possibles jette forcément le doute.

Un problème plus général est que la modification régulière des règles administratives de Pôle Emploi rend difficile les comparaisons dans le temps ; c’est un problème dont ne souffre pas le taux de chômage de l’INSEE, en tout cas tant que la définition du BIT 1) est utilisée 2) n’est pas modifiée.

Tout ça pour dire que les chiffres de Pôle Emploi vont désormais devenir trimestriels. Je m’en réjouis, car cela améliorera, en tout cas je l’espère, la qualité du débat public sur les questions du chômage.

Pourquoi les chiffres de Pôle emploi vont-ils devenir trimestriels ?

Pourquoi les chiffres de Pôle emploi vont-ils devenir trimestriels ?

Les chiffres du chômage de Pôle emploi ne seront plus publiés mensuellement mais par trimestre, comme ceux de l’Insee.

www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2018/01/24/pourquoi-les-chiffres-de-pole-emploi-vont-ils-devenir-trimestriels_5246561_4355770.html

Par Olivier Simard-Casanova

Économiste et doctorant en économie, je suis le fondateur de L'Économiste Sceptique.

Bonjour, c'est Olivier – alias L'Économiste Sceptique 🙂

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